Un salarié peut introduire une action en justice contre son employeur même si son contrat de travail n’est pas rompu.
Il le fera s’il conteste les conditions d’exécution de son contrat, ou s’il estime que son employeur ne lui règle pas la totalité de son salaire (heures supplémentaires non payées etc.).
Le salarié peut aussi estimer qu’il n’a pas le positionnement conventionnel qu’il mérite par rapport au travail effectué, ou encore s’il souffre de discrimination…
Autant de motifs qui peuvent expliquer qu’un procès se tienne entre l’employeur et le salarié, alors même que le contrat est toujours en cours.
Quelle que soit l’issue de ce procès, on peut imaginer que les relations entre l’employeur et le salarié risquent d’être affectées. Dans tous les cas le contrat de travail se poursuit, mais en opposant deux parties aux intérêts divergents, dont l’une aura succombé en tout ou partie.
NB : Cette étude ne vise pas le cas de la demande de résiliation judiciaire du contrat.
Dans ce contexte de tensions, le salarié qui se verra ensuite notifier une sanction ou qui sera licencié (même pour motif non disciplinaire) risque de suspecter l’employeur de s’être vengé de l’action prud’homale qu’il avait introduite, en représailles.
1/ La nullité du licenciement pris par l’employeur en représailles
Le principe est la nullité de la sanction ou du licenciement qui serait pris en représailles de l’action judiciaire introduite par le salarié.
L’article L1134-4 du Code du travail dispose qu’« Est nul et de nul effet le licenciement d’un salarié faisant suite à une action en justice engagée par ce salarié ou en sa faveur, sur le fondement des dispositions du chapitre II, lorsqu’il est établi que le licenciement n’a pas de cause réelle et sérieuse et constitue en réalité une mesure prise par l’employeur en raison de cette action en justice. Dans ce cas, la réintégration est de droit et le salarié est regardé comme n’ayant jamais cessé d’occuper son emploi ».
La Cour de cassation juge « qu’est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale le licenciement intervenu en raison d’une action en justice introduite par le salarié», donc en représailles (Cass. soc.,16 mars 2016, n° 14-23.589 ; Cass. Soc. 3 février 2016 14-18.600).
La Haute juridiction renvoie aux dispositions de l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Le salarié qui est licencié en représailles à une telle action en justice va pouvoir prétendre à une indemnisation qui sera supérieure aux plafonds normalement instaurés par la Loi MACRON dans le cadre d’un licenciement.
L’article L.1235-3-1 du Code du travail prévoit que « Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. ».
2/ La preuve des représailles : Etablir le lien de causalité entre le licenciement querellé et l’action en justice passée
La nullité ci-avant évoquée n’est pas automatique.
Il est évident que, quel que soit le passé judiciaire entre le salarié et l’employeur, ce dernier conserve la possibilité de licencier le salarié si un motif réel et sérieux le justifie (disciplinaire, ou non).
La suspicion de représailles ne pourra pas être totalement évitée. Alors l’employeur devra s’assurer qu’il dispose de toutes les preuves concrètes qui justifient sa décision de licencier.
De son côté, si le salarié considère que son licenciement est abusif et uniquement motivé par la vengeance, il devra apporter des éléments de preuve au juge prud’homal pour obtenir la nullité de son licenciement.
La preuve du lien de causalité peut résider dans la concomitance entre l’action en justice et le licenciement (Cass. soc. 6 février 2013 n°11-11.740).
A charge pour l’employeur « d’établir que sa décision était justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l’exercice, par les salariés, de leur droit d’agir en justice».
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Cet article est non exhaustif. Si vous êtes dans une telle situation, le Cabinet FOUQUE-AUGIER vous assiste pour assurer votre défense devant les juridictions prud’homales. Soumettez-nous votre situation pour une analyse personnalisée.