1/ Le respect de la vie privée du salarié : principe de base et exceptions
Le respect de la vie privée du salarié est consacré dans le code du travail à l’article L.1121-1 qui dispose :
« Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. »
L’employeur doit observer ce principe et ne doit donc pas s’immiscer dans la vie privée du salarié, ni y apporter des restrictions injustifiées.
Cette interdiction de principe n’est pas sans limite. Dans certaines circonstances l’employeur peut contraindre le salarié à se plier à certaines règles dans des domaines qui relèvent pourtant de sa vie privée.
Tel est le cas de la tenue vestimentaire. L’employeur peut exiger une tenue particulière, ou interdire certains vêtements (Cf l’étude consacrée à la question « L’employeur peut exiger une tenue vestimentaire correcte »).
Il peut également interdire les tenues ou insignes à caractères religieux (Cf l’article sur Le principe de neutralité et l’interdiction du port des signes religieux).
2/ Le domicile : cœur de la vie privée du salarié
Le principe légal est que Toute personne dispose de la liberté de choisir son domicile.
Dans certains contrats de travail on trouve pourtant parfois des clauses visant à limiter le choix du domicile du salarié.
Ces clauses sont-elles licites ? Elles peuvent l’être, à plusieurs conditions.
D’abord elles doivent être justifiées par un motif sérieux, vérifiable, en lien uniquement avec le travail. La situation de l’entreprise ou le poste du salarié peuvent expliquer une telle restriction. Tel pourrait être le cas du salarié dont les missions lui imposent de pouvoir intervenir en quelques minutes seulement.
Ensuite l’employeur doit exposer précisément ce principe dans le contrat de travail. En se contentant d’indiquer que le salarié « devra vivre dans un périmètre de 15 km aux alentours du lieu de travail pour des raisons d’organisation », l’employeur viole la vie privée du salarié.
Restreindre la liberté de choix du domicile est un acte très grave qui doit être sérieusement justifié. Il doit s’agir de la dernière possibilité pour l’employeur.
En conséquence, la clause contractuelle qui prévoirait une limitation de domicile injustifiée serait inopposable au salarié. Même si elle a été signée dans le cadre du contrat de travail, elle sera sans effet. Concrètement il ne pourra pas être reproché au salarié de déménager hors du périmètre.
NB : En revanche le salarié qui choisit d’habiter loin de son lieu de travail doit prendre ses responsabilités. Le fait d’habiter en dehors du périmètre n’est pas une faute en soi. Mais constitue une faute le fait d’arriver en retard le matin, de prendre des pauses trop longues ou encore de partir avant l’heure le soir.
3/ L’exclusivité dans le contrat de travail : une autre atteinte à la vie privée du salarié
On trouve parfois des clauses d’exclusivité dans les contrats de travail. Ces clauses ont pour effet d’interdire au salarié de pratiquer une quelconque autre activité professionnelle.
Portent-elles atteinte à la vie privée du salarié (entendez par là : la vie du salarié en dehors de la relation de travail qui le lie à l’employeur) ?Ici encore, tout est une question de rédaction et de mesure.
Il a été jugé que la clause par laquelle un salarié se voit interdire toute autre activité professionnelle (pour son compte ou pour un tiers), porte atteinte au principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle. Elle viole sa vie privée, c’est à dire sa vie en dehors de l’entreprise. Rappelons que cette vie ne regarde en rien l’employeur. En tout cas a priori :
Une telle clause est toutefois valable si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise et « si elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché » (Cass. Soc. 25.02.2004, n°01-43392).
Une nouvelle fois, il appartiendra à l’employeur de correctement rédiger la clause du contrat de travail pour éviter de violer de la vie privée du salarié. Un maximum de précisions devront être données sur le motif de la restriction.
En cas de doute sur l’opposabilité de la clause, une juridiction prud’homale pourra être amenée à analyser les termes du contrat. D’où l’impératif de précision.
En toute hypothèse et même en l’absence d’une clause d’exclusivité, le salarié se doit de rester loyal envers son employeur.
Ainsi si le salarié développe une activité concurrente à celle de son entreprise, et utilise les informations reçues dans le cadre de son travail pour œuvrer ensuite contre elle, il pourra être sanctionné.
D’autres cas de restrictions de la vie privée du salarié peuvent être répertoriés. Cet article est non exhaustif. Si vous avez un doute sur la rédaction du contrat ou le bienfondé d’une clause, n’hésitez pas à demander une consultation personnalisée.