La rupture conventionnelle est très souple et permet souvent aux parties de mettre fin de façon amiable à un contrat de travail. Sous réserve des observations exposées dans l’étude y afférente « Pourquoi faire une rupture conventionnelle, et comment ? ».
1/ La rupture conventionnelle est le plus souvent autorisée
Même lorsque des évènements viennent perturber le cours normal de l’exécution contractuelle, la rupture conventionnelle est bien souvent possible.
Les évènements venant suspendre le contrat de travail
Ainsi la jurisprudence autorise expressément la rupture conventionnelle même pendant les évènements suivants affectant le contrat de travail :
D’abord, elle est possible pendant l’arrêt maladie simple du salarié. Le fait qu’il ne soit pas en poste ne fait pas obstacle à la rupture.
La seule limite est le cas dans lequel la pathologie du salarié affecterait ses capacités de discernement et donc vicierait son consentement.
Quoi que le salarié ne peut en principe pas contester la rupture conventionnelle a posteriori, il en garde la possibilité s’il prouve que son accord n’a pas véritablement été donné, que son consentement a été vicié.
Il peut demander la nullité de la rupture conventionnelle.
Ensuite la rupture conventionnelle est possible pendant l’arrêt de travail pour maladie ou accident d’origine professionnelle (Cass. Soc. 30.09.2014, n°13-16297 ; Cass. Soc. 16.12.2015, n°13-27212).
Elle est alors même envisageable après la reprise du salarié, dès lors qu’il a été déclaré apte (peu important les réserves qu’a pu émettre le médecin du travail) (Cass. Soc. 28 mai 2014, n°12-28082).
Elle est encore possible pendant le congé maternité d’une salariée (Cass. Soc. 25.03.2015, n°14-10149).
Plus précisément, la rupture conventionnelle peut intervenir pendant la suspension du contrat de ce fait, ou même après la reprise du travail de la salariée, durant la période de protection qui suit la fin de ce congé
La rupture conventionnelle peut aussi intervenir durant les congés spéciaux des salariés, tel que le congé parental d’éducation, ou le congé sabbatique ou sans solde (CA Nîmes, 12 juin 2012, n°11-00120 ; Circ. DGT 2009-4 du 17 mars 2009).
Les évènements mettant en péril la relation de travail
Au-delà de tels évènements venant suspendre le contrat de travail, d’autres circonstances peuvent affecter la relation contractuelle et la mettre en péril.
Ici encore la rupture conventionnelle peut être envisagée.
Tel est le cas dans un contexte conflictuel entre l’employeur et le salarié, sous réserve du véritable consentement des parties dans la rupture.
Ou bien encore en cas de difficultés économiques de la société. Ces dernières n’excluent pas d’avoir recours à la rupture conventionnelle, sauf si l’employeur utilise ce biais pour détourner la procédure de licenciement économique.
2/ Mais la rupture conventionnelle est parfois interdite
Il faut être très prudent lorsque le contrat de travail est affecté par l’une des causes susvisées.
Quoi que la rupture conventionnelle soit la plupart du temps envisageable, il est des cas où elle est strictement interdite : lorsque l’employeur utilise ce moyen pour contourner des règles d’ordre public et priver le salarié d’un régime plus avantageux auquel il pourrait prétendre.
Tel est le cas des difficultés économiques et du licenciement y afférent.
Tel est aussi le cas du salarié déclaré inapte d’origine professionnelle : Ici la jurisprudence a formellement interdit le recours à la rupture conventionnelle dans ce cas (Cass. soc. 12.02.2002, n°99-41698).
Les juges considèrent que l’employeur contourne les règles légales et que le salarié n’a aucun intérêt à conclure une rupture « au rabais ».
En effet, si le licenciement pour inaptitude ouvre droit aux allocations chômage comme une rupture conventionnelle, il est en revanche beaucoup plus avantageux que cette dernière concernant les indemnités de rupture.
Alors qu’une rupture conventionnelle permet au salarié d’obtenir seulement l’indemnité de licenciement légale, le licenciement pour inaptitude ouvre droit au doublement de cette dernière, ainsi qu’au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis.
En bref, l’employeur ferait une économie substantielle en concluant une rupture conventionnelle avec un salarié inapte au lieu de le licencier. Et cela est strictement interdit.
NB : On retrouve la même interdiction dans le cas d’un salarié qui n’a pas encore vu le médecin du travail mais dont l’imminence d’une déclaration d’inaptitude est évidente.
S’agissant de l’inaptitude d’origine non professionnelle, la jurisprudence semble également proscrire la rupture conventionnelle sauf dans l’hypothèse où le médecin du travail aurait expressément dispensé l’employeur de son obligation de reclassement.
En résumé même si la rupture conventionnelle est très souvent possible, il faut être vigilant sur le contexte dans lequel elle intervient, pour être sûr de son bienfondé et éviter ensuite tout litige visant à la voir annuler.